10. LES SOLEILS DES INDÉPENDANCES d’AHMADOU KOUROUMA
Par sa manière iconoclaste d’interroger la condition nouvelle de l’homme africain au lendemain de la décolonisation, l’oeuvre atypique d’Ahmadou Kourouma peut se lire comme une vaste et patiente entreprise de démystification. Elle se déploie sur plusieurs décennies, et se décline en une variété de thèmes dont cet opus offre une belle vision d’ensemble.
Les Soleils des indépendances (1970) décrivent les profonds bouleversements que subit la République de la côte des ébènes depuis son accession à l’indépendance. On y suit le destin de Fama, prince déchu qui respecte malgré toute la tradition des anciens.
Quel sera le sort de Fama, authentique prince malinké, aux temps de l’indépendance et du parti unique ? L’ancien et le nouveau s’affrontent en un duel tout à la fois tragique et dérisoire tandis que passe l’histoire, avec son cortège de joies et de souffrances.
Au-delà de la fable politique, Ahmadou Kourouma restitue comme nul autre toute la profondeur de la vie africaine, mêlant le quotidien et le mythe dans une langue réinventée au plus près de la condition humaine. Dès sa parution en 1970, ce livre s’est imposé comme un des grands classiques de la littéraure africaine.
9.Les Contes d’Amadou Koumba de Birago Diop
S’il avait le ventre derrière lui, ce ventre le mettrait dans un trou. S’il n’est que de vous nourrir, une seule femme suffit. Rendre un salut n’a jamais écorché la bouche. Demandez vous à l’aveugle de vous affirmer si le coton est blanc ou si le corbeau est bien noir ? Si tu plais au Bon Dieu, les hommes ne t’apprécient pas outre mesure. L’eau ne cuira jamais le poisson qu’elle a vu naître et qu’elle a élevé. La promesse est une couverture bien épaisse mais qui s’en couvre grelottera aux grands froids. Avoir la même haie mitoyenne n’a jamais donné deux champs de même étendue.
8.Le Roi de Kahel de Tierno Monénembo
Au début des années 1880, Aimé Victor Olivier, que les Peuls appelleront Yémé et qui deviendra le vicomte de Sanderval, fonde le projet de conquérir à titre personnel le Fouta Djalon et d’y faire passer une ligne de chemin de fer. On a presque tout oublié de lui aujourd’hui : il fut pourtant un précurseur de la colonisation de l’Afrique de l’Ouest, ses aventures faisaient le régal des gazettes de l’époque. Au cours de ses cinq voyages successifs, Sanderval parvient à gagner la confiance de l’almâmi, le chef suprême de ce royaume théocratique qu’était le pays peul, qui lui donne le plateau de Kahel et l’autorise à battre monnaie à son effigie.
De ce personnage haut en couleurs, Tierno Monénembo nous offre une foisonnante biographie romancée. L’épopée solitaire d’un homme, Olivier de Sanderval, qui voulut se tailler un royaume au nez et à la barbe de l’administration française… et des Anglais.
7.La Vie et demie de Sony Labou Tansi
Chaïdana et les siens sont le jouet d’une violence sans fin: le Guide Providentiel fait régner sur le peuple de Katamalanasie sa dictature absurde et sanglante. Dans ce pays maudit, les vivants ont à peine le droit de vivre et les morts refusent de mourir. Les guerres, les croyances et les amours se succèdent, déroulant la fable visionnaire d’un monde bien réel.
Grandeur et décadence de la Katamalanasie, immense pays d’Afrique noire soumis à la plus sanglante, mais aussi la plus absurde des dictatures. Les morts n’y meurent jamais tout à fait, juste retour des choses puisque les vivants n’ont guère le droit d’y vivre. Si le constat de Sony Labou Tansi, pour drôle et réjouissant qu’il soit, peut paraître pessimiste, c’est qu’il décrit, au-delà du continent africain, le monde du prochain siècle : « Au fond, la terre n’est plus ronde. Elle ne le sera jamais plus. La Vie et demie devient cette fable qui voit demain avec des yeux d’aujourd’hui. »
6.Une vie de boy de Ferdinand Oyono
Un jeune Noir élevé par un Père Blanc a pris, à l’instar de son maître, l’habitude de tenir un journal. Dès lors, il enregistre tout ce qui se passe dans le milieu des colons où, à la mort du Père Blanc, il est devenu le » boy » de l’administrateur des colonies, le » commandant » de l’endroit. Rien ne lui échappe. Il découvre deux mondes nouveaux, foncièrement différents, aveuglés par leurs préjugés, et amenés à coexister : le Quartier Noir, un village pauvre dans la ville, la Résidence, une ville opulente où vivent les Blancs.
Mêlé à tous, il rapporte les actes et les conversations de ses maîtres et de leurs amis, les jugements de ses camarades domestiques, les drames et les passions des uns et des autres.
5.UNE SI LONGUE LETTRE de MARIAMA BÂ
Une si longue lettre de Mariama Bâ fait manifestement parti des livres les plus lus au Sénégal en étant notamment étudié dans le système scolaire, mais il a également trouvé un écho dans beaucoup d’autres pays africains.
A travers les détails de ses pensées liées à ses états d’âme de femme, de mère et d’épouse, Ramatoulaye, le personnage principal, qui vit le deuil de son mari, écrit une lettre à sa meilleure amie Aïssatou vivant à l’étranger. A travers le quotidien qu’elle lui conte, c’est toute l’existence des femmes africaines qui se trouve dévoilée.
4.Ville cruelle d’EZA Boto (MONGO BETI)
Ville Cruelle d’Eza Boto est un roman très critique sur la période coloniale. Le livre raconte l’histoire de Banda, un garçon uniquement élevé par sa mère à Tanga Nord, après la mort de son père. Il désire se marier pour réaliser la dernière volonté de sa mère presque mourante. Mais il n’a pas assez d’argent pour la dot de sa fiancée. Il décide alors de se rendre à Tanga Sud, la zone commerciale de la ville, entièrement contrôlée par les colons, pour vendre du cacao en ville. Entre bastonnades, vols, brimades et exploitation, le jeune home sera très rapidement confronté aux réalités violentes de l’administration coloniale. Véritable satyre du passé colonial africain, ce livre est passé à la postérité, en majeure partie, pour sa description imagée des atrocités de la période coloniale.
3.L’aventure ambiguë de Cheikh Hamidou Kane
Roman de Cheikh Hamidou Kane (Sénégal, né en 1928), publié à Paris chez Julliard en 1961.
Première partie. Samba Diallo est un enfant qui a été confié par son père, Le Chevalier, au chef de la tribu des Diallobé afin qu’il suive l’enseignement d’un sévère maître d’école coranique, Thierno. Ce dernier a très vite repéré chez l’enfant des qualités exceptionnelles. Alors qu’il est arrivé à l’âge de se rendre à l’école européenne, les avis sont partagés: le chef des Diallobé hésite à l’y envoyer, le maître d’école le déconseille vivement et la Grande Royale, sœur du chef, y est au contraire favorable. Suivant les recommandations de la Grande Royale (afin qu’il apprenne à « vaincre sans avoir raison »), Samba Diallo fréquente l’école européenne, s’y montre excellent élève, apprend très vite et se voit proposer de poursuivre ses études à Paris.
Seconde partie. À Paris, Samba Diallo vit très mal son isolement et son déchirement entre ses deux cultures. Il rencontre Lucienne, une communiste, et Pierre-Louis, un avocat antillais militant, avec lesquels il débat de la confrontation et du bien-fondé de l’interpénétration des cultures. À la demande de son père, il regagne l’Afrique. Il rencontre un homme, devenu fou après un séjour en Europe, qui lui propose de prendre la succession du maître Thierno, décédé. Mais Samba Diallo a abandonné la pratique religieuse. Le fou poignarde Samba et met ainsi fin à l’ambiguïté de son aventure.
2. L’enfant Noir de Camara Laye
L’enfant noir grandit dans un village de Haute-Guinée où le merveilleux côtoie quotidiennement la réalité. Son père, forgeron, travaille l’or au rythme de la harpe des griots et des incantations aux génies du feu et du vent. Respectée de tous, sa mère jouit de mystérieux pouvoirs sur les êtres et les choses. Elle sait détourner les sortilèges et tenir à l’écart les crocodiles du fleuve Niger. Aîné de la famille, le petit garçon est destiné à prendre la relève de son père à l’atelier et, surtout, à perpétuer l’esprit de sa caste au sein du village. Mais son puissant désir d’apprendre l’entraînera inéluctablement vers d’autres horizons, loin des traditions et des coutumes de son peuple.
Un livre intemporel qui s’est imposé comme un classique de notre temps.
1.Le monde s’effondre (Things Fall Apart) de Chinua Achebe
À travers le destin d’Okonkwo, un notable de son clan, Chinua Achebe évoque le choc culturel qu’a représenté pour les autochtones l’arrivée des Britanniques à Igbos, à la fin du xixe siècle et la colonisation du Nigeria par les Britanniques. Presque coupés de l’extérieur, les habitants de la forêt équatoriale pouvaient imaginer un monde à leur image, fait de multiples dieux, de culte des ancêtres, de rites et de tabous. L’irruption des Européens et de leur religion, le christianisme, bouleverse toutes les croyances traditionnelles, d’où le titre du roman (tiré d’un poème de Yeats). Cependant, Chinua Achebe n’idéalise pas le passé. C’est parce que son meilleur ami a été victime d’un sacrifice humain que le fils d’Okonkwo rompt avec les pratiques de son village, ouvrant ainsi une brèche dans l’unité du clan.